LNMP : Vers une accélération du projet ?

C’est peut-être enfin un coup d’accélérateur qui a été donné à la Ligne Nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP) au mois de novembre 2020. En effet, alors que le comité de pilotage LNMP s’est réuni le 12 novembre dernier après la mission confiée par le ministre des transports quelques semaines plus tôt, la concertation publique lancée le 2 novembre s’est poursuivie malgré la crise sanitaire qui a obligé ses organisateurs à revoir le calendrier. Elle prendra fin le 15 janvier 2021.
Si le projet de la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan fait l’objet d’un processus de concertation continu depuis le débat public en 2009, ce qui pourrait être sa dernière phase, avant l’enquête publique tant attendue, a été lancée au début du mois de novembre 2020 autour d’une question : « Que pensez-vous de la future ligne TGV entre Montpellier et Perpignan ? »
Il s’agit essentiellement d’une concertation publique en ligne https://www.ligne-montpellier-perpignan.com/ pour laquelle les citoyens sont invités à s’exprimer : « la voix de chacun compte, y compris celle du simple citoyen. Car si les institutions, les associations, les organisations professionnelles ont l’habitude de s’exprimer sur ces dossiers, les usagers du train et la population dans son ensemble peuvent et doivent le faire eux aussi. C’est important car le projet est lui-même important » explique Pierre-Yves Guihéneuf, le garant de la concertation désigné en juin par la Commission Nationale du Débat Public.
« Tout le monde a le droit de questionner le maître d’ouvrage, de lui demander des explications voire de l’inciter à revoir ses argumentations. La concertation sert à cela ! » insiste-t-il.
Le 2 octobre dernier Pierre-Yves Guihéneuf s’est entretenu avec Eurosud TEAM dans le cadre du lancement de cette concertation. Un entretien mené aux côtés du CESER Occitanie qui avait pour objectif de recueillir et d’identifier les principaux enjeux et les attentes concernant le déroulement de cette concertation sur la phase 1 (Montpellier-Béziers) du projet LNMP. Un projet soutenu de longue date par notre association et notre président Jean-Louis Chauzy qui rappelle que « même si leurs temporalités sont différentes, ce projet LNMP est, avec GPSO, un dossier prioritaire. Il est essentiel de réussir à le faire pour notre région et pour l’Europe ».
Car oui, ces deux projets sont bel et bien distincts, mais ils ont de nombreux points communs dont celui de cristalliser tous deux, attentes et frustrations !
Doucement mais surement …
11 ans ! 11 ans déjà que la Commission Nationale du Débat Public, clôturait le Débat Public sur le projet de la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP) en précisant dans son bilan « la forte attente du territoire en faveur du projet ». Mais force est de constater que 11 ans plus tard LNMP n’a franchi aucune des procédures qui permettent aux grands projets d’infrastructures d’avancer dans leur construction. L’enquête publique, en particulier, aurait dû être lancée dans les 5 ans qui suivent la clôture du Débat Public.
Mais désormais, l’essentiel est ailleurs et dans notre contribution à la concertation nous avons tenu à exprimer notre satisfaction sur la relance de ce projet qui a connu beaucoup trop d’atermoiements (lien vers la contribution Eurosud TEAM).
Suite à l’annonce par l’Etat en 2017 de la « pause sur les grands projets », LNMP – comme d’autres projets d’infrastructures en France – aurait pu être définitivement abandonné. Mais grâce à la mobilisation des collectivités (au premier rang desquelles la Région Occitanie) et au soutien de nombreux acteurs sociaux-économiques locaux, LNMP figure désormais dans les priorités d’investissements de l’Etat pour les 10 ans à venir inscrites dans la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) promulguée en décembre 2019.
LNMP devrait même pouvoir faire l’objet d’une société de projet, autorisée par la LOM, un dispositif destiné à faciliter et à accélérer la réalisation des grands projets tels que celui-là ! Par ailleurs l’Europe maintient son soutien au projet et pourrait apporter des financements dans le cadre du MIE 2021-2027, à condition que l’Etat en fasse la demande.
Une concertation prolongée pour s’adapter au contexte sanitaire
C’est donc dans ce contexte que la concertation s’est ouverte au public le 2 novembre 2020 mais crise du COVID oblige, les dispositions de cette concertation ont dû être adaptées au contexte sanitaire pour permettre l’expression – la plus large possible – du public en toute sécurité. Ainsi des commissions consultatives réunissant les élus de chaque département ont eu lieu les 2 et 3 novembre derniers en visioconférence alors que la réunion publique prévue le 5 novembre, elle, a été reportée.
Tous les jeudis depuis le 19 novembre et jusqu’au 10 décembre, les experts de l’équipe Ligne Nouvelle Montpellier-Perpignan sont intervenus lors de quatre réunions d’informations et d’échanges, en visioconférence.
Quant aux ateliers thématiques du mois de décembre initialement prévus en présentiel ils ont finalement été maintenus mais en visioconférence, le 7/12 et le 8/12 autour de 2 questions : d’abord « comment favoriser l’insertion environnementale du projet ? » puis « comment utiliser les capacités nouvelles du réseau ? »
Alors que faut-il retenir de LNMP ?
La première des choses à retenir c’est que la Ligne Nouvelle Montpellier-Perpignan représente 150 km de ligne nouvelle, 30 km de raccordement au réseau existant, 2 gares nouvelles et des sections de ligne mixte. A ce stade il est prévu que le projet se déroule en 2 phases (A noter que la concertation publique porte uniquement sur la phase 1 du projet LNMP).
La première entre Montpellier et Béziers à horizon 2030 (52,3km de ligne nouvelle et 7km de raccordement, sans gare nouvelle), et la seconde phase entre Béziers et Perpignan (97,7km de ligne nouvelle et 23 km de raccordement avec 2 gares nouvelles) à horizon 2040.
Un phasage que nous déplorons car ainsi « morcelé » il répond à une logique budgétaire de court terme, qui coutera plus cher finalement et comme le souligne le président Jean-Louis Chauzy « une infrastructure en pointillés ne permettra pas de développer une qualité de service répondant à une logique d’axe. Elle risque de ne pas être au rendez-vous en termes de destinations, de temps de parcours, de fréquence, de qualité de sillons, de capacité ».
Par ailleurs, en phasant le projet, l’apport de clientèle ne sera pas significatif et le modèle économique s’en ressentira avec pour conséquence évidente d’avoir du mal à mobiliser les financeurs.
Car ce qu’il faut bien retenir également de ce projet c’est que la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan est stratégique. D’abord au niveau national puisqu’elle réduira les temps de parcours entre les grandes villes occitanes et les grandes métropoles situées tout au long des axes du secteur rhodanien, Paris-Perpignan et du Grand Sud, Nice-Bordeaux. Mais aussi au niveau régional puisqu’elle améliorera la desserte du littoral occitan en permettant la mise en œuvre d’un service régional à haute fréquence.
Mais pas seulement ! Depuis les mises en service du Contournement de Nîmes-Montpellier (CNM) et de la ligne Barcelone-Figueras, on peut dire que LNMP est le dernier maillon manquant restant à construire pour assurer la continuité de la grande vitesse entre la France et l’Espagne, deux pays disposant d’un vaste réseau ferroviaire à grande vitesse.
Des enjeux stratégiques à plusieurs échelles donc (européennes, nationales et régionales) et c’est d’ailleurs pour toutes ces raisons que LNMP est inscrite parmi les priorités retenues par l’Etat dans la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) de 2019 et dans les corridors prioritaires européens
Le ministre des transports sollicite le comité de pilotage
Un projet crucial donc et s’il était au cœur des discussions en fin d’année 2020 grâce à la concertation publique, il a également reçu un soutien important avec le comité de pilotage du 12 novembre organisé par le préfet de Région Etienne Guyot et la présidente de Région Occitanie, Carole Delga sur mission du ministre des transports Jean-Baptiste Djebarri. Cette réunion a permis d’informer chacun des 3 départements concernés par cette ligne Montpellier-Perpignan à savoir l’Hérault, l’Aude et les Pyrénées-Orientales des conditions d’avancée du projet.
A l’issue de cette réunion le préfet a rappelé l’investissement pour LNMP, qui s’élève à 5.52 milliards d’euros. « C’est une priorité pour l’Etat » a-t-il précisé. « Ce comité de pilotage a permis de confirmer l’engagement des acteurs pour la poursuite des études préalables à l’enquête publique et les acquisitions foncières. Nous sommes convenus de préparer un projet de protocole de financement du projet pour le printemps 2021 » a-t-il déclaré.
Quant à Carole Delga, la présidente de la Région Occitanie, elle a expliqué que : « la création de la Ligne Nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP) est une urgence. A la fois parce que nos liaisons régionales sont saturées, ne nous permettant pas de proposer des dessertes supplémentaires entre Montpellier, Béziers, Narbonne et Perpignan. Mais également en raison des risques climatiques, de submersion marine, de la ligne actuelle qui nous oblige à apporter une solution sécurisée pour les voyageurs par la construction d’une nouvelle ligne. ».
Pour la présidente de la Région, il est désormais important « d’accélérer le lancement de l’enquête publique et de fixer avec Bercy la création rapide de la société de financement »
Un point de vue que nous partageons à 100%. Car en effet, les difficultés rencontrées sur le réseau actuel sont récurrentes. Un incident majeur a eu lieu sur la voie entre Béziers et Agde en octobre 2019 en raison d’orages violents. Les travaux ont été longs et couteux pénalisant les populations locales et paralysant totalement le corridor méditerranéen et ses services ferroviaires voyageurs et marchandises.
En raison de la saturation du réseau, notamment au niveau des nœuds urbains, la Région Occitanie qui investit massivement dans les TER ne peut plus développer la politique des trains du quotidien compte tenu de sa croissance démographique et des enjeux climatiques. C’est également ce que nous expliquons dans notre contribution à la concertation publique en insistant aussi sur le fait que la naissance de la grande région a rendu indispensable le rapprochement entre les 2 métropoles Toulouse et Montpellier.
Et puis le développement du fret ferroviaire, également considéré comme prioritaire par l’Etat restera limité dans son développement, faute d’infrastructures nouvelles.
Il faut d’ailleurs trancher définitivement cette question de la mixité de la ligne jusqu’à Perpignan, car dans un contexte de montée des eaux non maitrisé à ce jour, le bon dimensionnement et la mise en sécurité des nouvelles infrastructures doit être prioritaire. Il est avéré que la voie littorale dont on nous dit aujourd’hui encore qu’elle absorbera le fret entre Montpellier et Perpignan sera impactée par la montée des eaux à court ou moyen termes. Les récents incidents climatiques et la perspective de leur augmentation en fréquence et en intensité, contraignent selon nous à prendre la décision d’un axe mixte de bout en bout entre Montpellier et Perpignan et pas uniquement entre Montpellier et Béziers.
« Soyons innovants pour configurer ce grand axe ferroviaire mixte. L’avenir du fret ferroviaire passe aussi par des infrastructures nouvelles et c’est l’absence d’investissement dans ce mode qui produit les murs de camions que nous subissons dans cette région depuis des décennies ». C’est aussi pour lancer ce message que nous avons souhaité produire la contribution d’Eurosud TEAM à la concertation publique sur la section de ligne nouvelle Montpellier-Béziers.
Prochaine étape ?
Il ne reste désormais plus qu’à fixer un calendrier précis pour voir aboutir la société de projet qui portera le financement du projet LNMP et il est important que plus aucun retard ne soit pris car si l’on peut effectivement affirmer que les choses se sont accélérées en fin d’année 2020 pour LNMP, il semble désormais évident (au vu des avancements du projet GPSO – voir notre article dans la newsletter du mois d’octobre), que ce projet devra raccrocher – à long terme – le tronçon Toulouse-Narbonne.
Pour, Eurosud TEAM en effet, « LNMP avec sa première phase Montpelier-Béziers devra s’ancrer dans l’axe Atlantique-Méditerranée ». D’ailleurs ce projet commence à faire son chemin dans le Forum du Corridor Méditerranéen qui s’est réuni récemment pour travailler sur l’intégration de nouveaux maillons prioritaires. Toulouse-Narbonne en fait partie ! Une nouvelle dont se réjouit le président d’Eurosud TEAM, Jean-Louis Chauzy qui a toujours affirmé que : « tous ces projets sont interdépendants, leur finalité est bien l’interconnexion des métropoles du Sud-Ouest Européen ».

 

Partager cet article?